Souffrir pour être belle

On a découvert cet article via la newsletter de Titiou x Slate, il est ultra poussé, ça peut faire mal à la tête mais en même temps ça fait tellement de bien…

« L’abnégation que l’on exige de la part des femmes peut aller un cran au-dessus de celui de l’interdit du plaisir : la douleur. « Il faut souffrir pour être belle » est un adage connu de tous et de toutes.

Quasiment toutes les pratiques de beauté impliquent de la douleur, de celle relativement faible causée par le démêlage des cheveux longs aux graves séquelles que peut engendrer la chirurgie esthétique. Lauren du blog « les Questions composent » décrit bien les tortures, petites ou grandes, qui rythment la vie des femmes. Epilation, talons aiguille, régimes et purgations, massages anticellulite, chirurgie esthétique… toutes ces pratiques relativement courantes ou non, engendrent de la douleur à des degrés divers. Dans des cultures éloignées géographiquement et/ou temporairement, les pratiques de beauté varient grandement, mais la douleur qu’elles génèrent est toujours là : bandage des pieds, mutilations génitales féminines, gavage ou encore corset. On peut trouver quelques exemples ici et . Ainsi, beauté féminine et douleur semblent aller de pair, et ceci à pratiquement toutes les époques et dans tous les pays.

Notons qu’outre la douleur et les blessures physiques, le mythe de la beauté engendre douleurs et maladies psychologiques. Ce point sera abordé plus précisément dans l’article suivant.

Pourquoi les pratiques de beauté provoquent-elles quasiment toujours de l’inconfort, voire de la douleur ? J’envisage deux causes à cela qui ne se situent pas au même niveau. Pour les expliquer, je donnerai des exemples qui ne proviennent pas nécessairement de la culture occidentale.

Le remodelage du corps des femmes

La première réside dans le principe même des pratiques de beauté. En effet, celles-ci ont pour objectif de remodeler le corps des femmes, considéré comme laid au naturelcontrairement à celui des hommes (pensons notamment aux poils : une femme qui garde sa pilosité naturelle est considérée comme un monstre ; pas un homme). Or les modifications corporelles impliquent de mettre à mal les limites et les équilibres du corps ou de perturber certains système biologiques. Par exemple :

  • les talons aiguilles déplacent le système de gravité, déséquilibrent le corps et obligent ainsi l’ensemble des muscles impliqués dans le maintien de la position debout et dans la marche à ne pas travailler de manière optimale, ce qui entraîne des douleurs1.
  • Les massages anti-cellulites consistent à pincer et à maltraiter la peau afin d’y déloger la graisse.
  • Les différentes techniques d’épilation (arrachage des poils, destruction des follicules pileux, …) consistent à attaquer le système pileux.
  • La chirurgie esthétique, sans doute l’exemple le plus emblématique, consiste à découper la peau, ouvrir la chair, pour modifier l’aspect de différentes parties du corps.

Ces pratiques attaquent donc toujours le corps, ses équilibres et ses limites, d’une manière ou d’une autre. Selon la définition officielle de l’Association Internationale pour l’Etude de la Douleur (IASP), la douleur constitue  « une expérience sensorielle et émotionnelle désagréable associée à une lésion tissulaire réelle ou potentielle, ou décrite en des termes évoquant une lésion2 ». Elle est donc une conséquence logique des pratiques de beauté qui génèrent fréquemment des lésions, souvent invisibles à l’œil nu. Plus globalement, aller à l’encontre du fonctionnement normal du corps induit des expériences désagréables, qui ne sont pas stricto sensu de la douleur (car non générées par des lésions tissulaires). Ainsi, les régimes n’induisent pas de lésions des tissus, mais ils perturbent le système impliqué dans la régulation de la prise alimentaire. Ils génèrent alors d’autres expériences désagréables : la faim et la frustration3.

Par ailleurs, au-delà de la douleur physique, certaines pratiques de beauté peuvent être extrêmement dangereuses pour la santé, justement du fait qu’elles déséquilibrent et attaquent les systèmes biologiques. Par exemple, le bronzage est à la base un système biologique de défense contre l’excès de rayonnements solaires. Ce système de défense naturelle a ensuite été détourné en pratique de beauté, l’exposition volontaire aux rayons ultra-violets permettant d’acquérir un teint hâlé. Or l’exposition excessive n’est pas sans danger.  Ainsi, les cabines à UV, fréquentées majoritairement par les femmes4–8, sont à l’origine de diverses blessures de la peau (brûlures, cancers, …)9–13. Ainsi, même en l’absence de douleur immédiate, certaines pratiques, en mettant en péril la santé, induisent une douleur déférée dans le temps. (…) »

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